Suite Déclaration commune MEDEF, CFDT, CFTC

Analyse de Stéphane SIROT.

C'est tout vu !! Ceux là faut les mettre dans un bocal au formol !! 

A la veille du 1er mai, le MEDEF, la CFDT et la CFTC ont publié une "déclaration commune pour le maintien ou la reprise des activités économiques dans des conditions sanitaires optimales".
Manifestement, il est plus aisé aux organisations de travailleurs dites "réformistes" - que je préfère appeler contre-réformistes tant elles participent au détricotage des droits sociaux - d'envisager une "déclaration commune" avec le MEDEF que de participer à des manifestations et des mouvements sociaux avec leurs homologues de "transformation sociale". Mais ça, chacun y est sans doute désormais habitué.


Le paraphe des seules CFDT et de son appendice chrétien maintenu (peut-être leur faudrait-il d'ailleurs envisager sérieusement une réunification) a malgré tout quelque chose d'un peu rassurant en matière de tectonique des plaques syndicales : c'est une minorité de la représentation du monde du travail qui s'associe ici au MEDEF.
Lire ce texte en vaut la peine. Je n'ai pas suffisamment de temps à perdre pour en faire une longue exégèse. Quelques remarques suffisent à en résumer la tonalité et les enjeux.
Cette "déclaration commune" commence par un savoureux satisfecit en direction du gouvernement qui "a pris des mesures exceptionnelles, concernant notamment les règles de santé et dé sécurité applicables à l'ensemble de la population et, par conséquent, aux acteurs économiques". Il est vrai que la population française croule depuis deux mois sous les milliards de masques et autres tests de dépistage... Mais passons.
Suit quelques lignes plus loin, sans surprise, une ode au "dialogue social", "un levier pour traiter les sujets au plus près des besoins et trouver les bonnes solutions pour tous"... Et sans doute aussi, bientôt, pour négocier l'allongement de la durée du travail, la retenue de journées de RTT et/ou de jours de congés payés... D'ailleurs, le MEDEF comme la CFDT l'ont déjà évoqué par ailleurs.
C'est donc dans chaque entreprise que devront être prises les mesures à propos de "l'environnement de travail et des modalités d'organisation du travail" (lesquelles...??). Cela "en concertation avec les salariés et leurs représentants quand ils existent" (sic). Et quand ils n'existent pas ?? En "concertation", autrement dit sans garde-fou ni contrainte. Une concertation n'est pas une négociation et n'appelle pas l'éventuelle conclusion d'un accord collectif contraignant a minima.
Le texte est d'ailleurs truffé d'expressions impliquant l'absence d'obligations réellement contraignantes pour les entreprises : "le cas échéant" ; "il est recommandé" ; "il peut" ; les "entreprises peuvent", "si elles le souhaitent" ; "si possible" ; "il peut être envisagé" ; "dans la mesure du possible"...
Mais n'ayez pas peur voyons !! Tout cela est destiné à être contrôlé de manière parfaitement neutre... Le texte recommande en effet la mise en place dans les entreprises d'une "cellule de crise" ou d'un "correspondant COVID-19"... "placé sous l'autorité de la direction ou du management de l'entreprise"... Magnifique gage d'indépendance, n'est-ce pas ?
Bref, la tonalité générale prend d'abord (si ce n'est presque exclusivement) en considération les enjeux de l'entreprise. Rien ou quasiment rien sur les problématiques sociales auxquelles sont et seront confrontés les salariés aujourd'hui et demain, dans le cadre du déconfinement. Mais peu importe. C'est bien connu : l'entreprise est une communauté humaine où chacun converge vers des intérêts identiques...
Quel malheur ! Quelle période ! En plus du coronavirus, les salariés vont devoir encore affronter le virus contre-réformiste. Ce n'est pas un, mais deux vaccins qu'il faudrait prévoir !! Le premier, laissons-le aux scientifiques. En revanche, pour le second, chacun d'entre nous peut s'en occuper à la place qui est la sienne. Tout au moins s'il considère que la lutte des classes, le rapport de force et l'émancipation du plus grand nombre ne sont pas à dissoudre dans un consensus gouvernementalo-entrepreneurial destiné à pérenniser et garantir la survie de l'ordre dominant.

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